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La Poésie de l'Est et l'Ouest
7 avril 2021

La fable d'Erras et Lilien X : Le Navire Enchanté

 

Partie3

 

Le loup courait sur la Terre sans se soucier de la distance et c’est au cœur d’une forêt qu’il trouva le Cerf Très-Savant buvant à une source ; le Corbeau se tenait perché sur ses bois et se désaltérait à la rosée qui en dégouttait. Le Cerf leva la tête à l’arrivée du loup et lui toucha le front de son museau lorsque son hôte s’inclina. Puis le loup s’en fut dans l’ombre de la forêt et nul ne sait plus rien de lui. Alors le Cerf se mit à courir, suivi par le vol du Corbeau, et il parvint à l’endroit où les rois avaient péri. L’Ombre s’était dispersée et les oiseaux, libérés du joug de Lilien, étaient les seuls maîtres en ces bois. Le corps d’Erras avait disparu, emporté par quelque crue de la rivière, mais celui de Lilien gisait comme au jour de sa mort sur les tronçons de son épée.

La dernière chose que l'on raconte au sujet de Lilien est la suivante. Un bateau descendait la rivière avec à son bord un équipage à la solde d'un homme doté de grands pouvoirs. Son navire était capable de descendre et remonter les chutes et les rapides sans que nul à son bord n'en subisse le moindre inconfort. Le capitaine avait sommeillé à la source du fleuve depuis des temps immémoriaux, attendant la fin d'une ère pour se mettre en mouvement. Nul ne sait qui l'avait posté là, ni quelle était son histoire avant cela. Lorsqu'il arriva près de l'endroit de la mort des deux rois, le capitaine arrêta la course du vaisseau et le fit aborder, car il avait aperçu le Cerf. Comprenant qu'il s'agissait là d'un être plus digne et plus puissant que lui, il accepta de recueillir le corps de Lilien à sa demande. Il emporta aussi Révalence, laissant les tronçons de l'épée brisée, puis reprit sa navigation jusqu'à l'océan. Là, un aigle géant les bénit d'un vent favorable en direction de l'horizon qu’un arc-en-ciel chevauchait d’un bout à l’autre ; le vœu des dieux qui habitent désormais les cieux était accompli.

Estimant l’arc-en-ciel, le Cerf ne voulait pas le voir quitter le monde ; il le réclama et le confia aux Cieux. Puis il se détourna et disparut dans la forêt et on raconte qu’il y court toujours en compagnie du Corbeau, bramant à l’aube pour appeler le soleil et se souvenant, chaque fois que l’automne vient, des derniers jours où le monde n’était pas encore venu aux mains des hommes nés dans l’ère de la mort.

 

© Cédric Logue-Martin, 2021.

 

 

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